Royal par Jean-Philippe Baril Guérard 4,5/5 *Avertissement : langage pouvant choquer & contenu sexuel explicit. Je dirais même 16+ *Une adaptation cinématographique réalisée par Francis Leclerc a été annoncée Prix : Finaliste pour le Prix littéraire des collégiens (2018), liste préliminaire du Prix des libraires du Québec (2018) English : No announcement for an English translation has been made Résumé La faculté de droit de l’Université de Montréal est le dépotoir de l’humanité. Tu le sais : t’en es le déchet cardinal. Tu viens de commencer ta première session, mais y a pas une minute à perdre: si tu veux un beau poste en finissant faudra un beau stage au Barreau et si tu veux un beau stage au Barreau faudra une belle moyenne au bacc et si tu veux une belle moyenne au bacc faudra casser des gueules parce qu’ici c’est free-for-all et on s’élève pas au-dessus de la mêlée en étant gentil. Être gentil, c’est être herbivore, c’est se vautrer dans la médiocrité, et toi tu comprends pas la médiocrité, tu aimes pas la médiocrité, tu chies sur la médiocrité. Toi, t’es venu ici pour être le roi de la montagne, et le début des cours, c’est le début du carnage. – Goodreads Ma chronique Si tu penses que tu as tout vu, tout lu, tu n’es pas prêt pour Royal. En tant qu’aspirant étudiante en droit et ayant étudié pendant la majorité de ma vie dans des écoles privées, je savais que j’allais adorer Royal. Je possède assez le sens de l’autodérision pour ne pas être offusquée des blagues sur les classes hautes et les préjugés associés (snobisme, argent…) Le personnage principal a exactement mon parcours, et je suis assez confortable avec celui-ci pour être capable d’en rire et d’admettre la superficialité de certains comportements des étudiants qui sont prêts à tout pour réussir. Bien que je sois certaine qu’il y ait de l’exagération à certains égards, nous avons tous entendu des histoires d’horreur qui s’apparentent aux événements du roman, même s’il est certain que ce n’est pas le cas de la majorité des étudiants à l’Université de Montréal. (D’ailleurs, je me demande comment celle-ci à réagit à la parution de ce livre…) L’histoire de Royal m’a prise par surprise. Je croyais qu’il allait s’agir une guerre inter-élèves du début à la fin, mais on découvre l’univers du personnage bien plus que celui de l’école. Baril Guérard décortique le cerveau du personnage et l’expose au lecteur dans toute sa laideur et ses complexes. Le personnage principal est détestable : il est égocentrique, antipathique et cynique. Le parfait antihéros. Baril Guérard aborde la notion du suicide d’une manière différente que la majorité des bouquins qui ont tendance à stéréotyper le suicide : un personnage marginal qui n’aime pas sa vie et qui n’a aucun ami ni famille… Bien qu’il n’y ait rien de mal à présenter cette facette de la maladie mentale, Royal touche beaucoup plus sur la notion de la dépression lié au burnout professionnel. On a tous déjà questionné si on voulait continuer, si notre vie veut vraiment dire quelque chose dans l’espace-temps. Il se tue pratiquement pour atteindre ces buts, et lorsque son plan de vie ne va pas comme il l’avait prévu, il panique et sombre dans la dépression. Le motif du suicide est pratiquement égocentrique. Le but n’est pas de ressentir de la pitié pour le personnage, mais plutôt de le détester dans ces actions. Le personnage de Royal a tout pour réussir, des « amis », une amoureuse, des bonnes notes (pas assez bonnes pour lui, mais plus qu’acceptables), un beau corps et un désir de se battre pour atteindre son but. On devient frustré de voir une personnage qui a tout se plaindre d’être en manque. Les péripéties qui déclenchent la maladie mentale changent d’individus en individus, et Royal exacerbe les craintes de plusieurs jeunes adultes à la recherche d’une destinée. Il est clair que quelqu’un ne va pas mieux lorsqu’il continue à prendre des drogues, ne pas dormir et sans avoir de débouché pour libérer ces émotions. Royal nous pose une réflexion intéressante, dans la vague de l’émission très contestée « Thirteen Reasons Why », sur la maladie mentale et le suicide. Je n’ai jamais lu une histoire similaire à celle de Royal. Les péripéties sont absolument folles et effrayantes. Ce n’est pas une dystopie, mais pourtant c’était mille fois plus épeurant que des zombies parce que l’histoire n’est pas si farfelue. Elle nourrit les craintes et les stéréotypes des étudiants en droit, même si je sais de source certaine que pas tout le monde n’est comme ça. Par contre, attention aux âmes fragiles puisque le roman contient de nombreuses scènes sexe très graphiques et violentes, incluant une scène de viol. La sexualité est présentée comme une bataille pour reprendre le contrôle sur sa vie, se sentir en puissance. Le crash émotionnel du personnage paradoxalement à son succès a un effet mixte. On veut être empathique qu’il ait mieux, mais en même temps on le déteste pour sa misogynie et son tempérament exécrable. Lorsqu’il a des petites victoires, on est heureux pour lui, mais tellement fâché qu’une personne comme lui réussisse. On ne s’ennuie pas du tout avec Royal malgré les quelques longueurs au début du roman. Baril Guérard réussit un tour de force. Le cynisme du personnage aurait pu rapidement tomber dans le caricatural ou l’ennuyant, mais ce n’est pas le cas. Les pointes sarcastiques et viles sont parfaitement bien calculées et font bien rire le lecteur. J’ai remarqué dans mon entourage que les personnes qui ont aimé Royal ont tendance à avoir des comportements plus compétitifs et anxieux, tandis que ceux qui ont détesté sont plus calmes et positifs (très rare sont les gens qui sont restés indifférents à la suite de leur lecture). Évidemment il y a des exceptions, mais je crois que le snobisme et la méchanceté du personnage peut repousser le lecteur si le contraste est trop grand avec ses valeurs personnelles. La narration à la deuxième personne semble être populaire ces temps-ci! Dans ce cas, je l’ai trouvé bien maîtrisée. Il n’était pas difficile de s’engouffrer rapidement dans l’histoire. Je ne crois pas que le « tu » était utilisé pour que le lecteur s’identifie au protagoniste, je l’ai compris plutôt comme un avertissement que personne n’est à l’abris de la dépression. La jeunesse à beau nous convaincre que nous sommes le.a roi.eine de la montage, il y aura toujours des embuches. Je ne crois pas que Royal gagne le prix cette année. Je le compare beaucoup avec Des femmes savantes de l’édition 2017, car les deux avaient des propos choquants et les deux avaient été très controversés parmi les étudiants. J’aimerais toutefois le voir gagner si ce n’est que pour encourager la réflexion autour des stigmas de la maladie mentale. Royal est une œuvre polarisante, mais tout chef d’œuvre ne fait-il pas face à des controverses? Si vous avez aimé Royal, vous allez adorer… It’s Kind of a Funny Story de Ned Vizzini Des femmes savantes by Chloé Savoie-Bernard All the Bright Places by Jennifer Niven
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